Ta gueule, Martine !
Alors tu vois, Martine, il y a des icônes à la con qu'on a envie de dézinguer.
Un exemple ? Jean Gabin.
Jean Gabin, c'est un peu le saint graal du cinoche franchouillard. La figure honnête et virile, un peu peuple et pourtant tellement glamour. Le genre de mec que les générations suivantes vénèrent et se gargarisent avec. Rrrrrhaaaaa ! Gabin, ça c'était de l'homme, du vrai, du solide. Un roc, un cap, une péninsule !
Perso, le Gabin, j'ai toujours trouvé qu'il avait un gros tarin pas beau et qu'il jouait comme une espadrille de contrefaçon. Qu'il ait de la présence, je ne nie pas, mais c'était une présence dont personnellement je pouvais très bien me passer.
L'autre jour, je regarde un vieux film sur Arte (je suis snob et je t'emmerde, Martine). "Témoin à Charge" avec Marlene Dietrich. Ce doit être la troisième fois que je le vois sur une trentaine d'années, et ça tient toujours la route, pas tant que "Le Limier" de Mankiewicz ou "L'affaire Cicéron" de Mankiewicz ou "All about Eve" de Mankiewicz (l'un de mes films préférés, je suis snob et je te crotte le poupou, Martine !), mais bon, un bon film, bien que pas de Mankiewicz, mais du génie fulgurant et divin : Billy Wilder.
Tu connais pas Billy Wilder ??? Martine, tu es répudiée. On est entre snobs ici, on regarde des films en noir et blanc, en VO uniquement et on trouve Tarantino violent.
Or donc, après le témoin à charge, docu de la mère Docu sur les amours de Marlène Dietrich et du Jeannot Gabin.
Très pipole en mode gros slip sur les années 30 et 40, puisque je connais le nom des gens de cette époque alors que quand je me fais choucrouter chez le coueffeur aujourd'hui je ne connais pas le nom des gens sur les magazines de ragots... je tape l'incruste sur mon écran, et je regarde.
Et ben le Gabin, c'était un élégant. Un gros relou et un amer.
Il a une aventure de quelques années avec la Dietrich, qui est bien allumée au gaz il faut le dire, mais qui l'aime et lui donne tout ce qu'elle peut lui donner (elle n'est pas super fidèle, OK, mais ça n'empêche pas la primeur d'un grand sentiment). Ils se séparent, ou plutôt, il part, la laissant fort contrite et malheureuse.
Le temps passe. Il refuse de la revoir "amicalement". Un jour qu'il tourne sous ses fenêtres à Paris, elle lui fait porter un mot gentil pour l'inviter à prendre un café en souvenir... il déchire la lettre en déclarant qu'il en a marre de cette boche.
Elégant.
Quand il meure, on sonne à la porte de l'appartement de Dietrich. Un coursier lui livre un paquet rempli de tous les cadeaux qu'elle lui a fait.
Elégant.
Gabin, gros con.
Ta gueule, Martine !